Article

15 ans de SMA - Camille : ''l'âge d'ôr où on avait accès aux backstages, c'est fini!''

Mardi 3 décembre 2019



Camille, avec un peu de recul, penses-tu qu’il soit aujourd’hui facile de se lancer en tant que photographe de concert de rock dur ? Faut-il batailler pour obtenir des accréditations ou est-ce une simple procédure administrative ?

Pour la première question, je répondrais oui et non. Avec les avancées technologiques et la démocratisation des appareils photo aujourd’hui, il est aisé de s’équiper d’un produit de bonne qualité et faire un travail de reportage correct. Perso, à mes débuts, j’étais équipé d’un Canon 550D et d’un objectif 50mm.

Mon premier concert en tant qu’indépendant a été Cannibal Corpse
Cannibal Corpse


Clique pour voir la fiche du groupe
et DevilDriver
DevilDriver


Clique pour voir la fiche du groupe
, au Bataclan de Paris, en 2013. J’avais contacté la salle en justifiant le fait que je voulais commencer la photographie de concert et que j’avais déjà acheté mon ticket. Mes motivations étaient sincères.

Après, il faut rester réaliste : un·e débutant·e, sans média, sans book et sans carnet d’adresses aura difficilement accès à des artistes internationaux·ales, dès la première fois. À Strasbourg, je me cassais les dents sur beaucoup de demandes. J’ai donc commencé en bas de l’échelle avec les bars, les clubs, en m’adressant aux groupes qui jouaient en première partie et en achetant mes billets comme tout le monde.

Ce n’est qu’en intégrant Shoot Me Again Webzine que mon activité a véritablement décollé. Un média (et donc plus de visibilité pour les musicien·nes) ouvre bien plus de portes. C’est du donnant-donnant. Cette relation entre le média et les groupes est d’ailleurs plus forte en festival, où il faut fournir un travail de qualité - et rapidement - pour instaurer une confiance mutuelle et garantir une accréditation aux prochains évènements.


// Steve 'n' Seagulls

Dans certains types de musique plus mainstream, les artistes ont parfois la fâcheuse tendance à mettre des conditions (interdiction de photographier sous tel ou tel angle par exemple) ou demandent un droit de regard avant publication. Le ou la photographe de rock dur échappe-t-il·elle encore à ce genre de pression?

C’est devenu un sujet bien trop récurrent dans la photographie de concert. Le photographe Eric Canto a fait plusieurs publications à ce sujet, que ce soit pour les ZZ Top
ZZ Top


Clique pour voir la fiche du groupe
, Rammstein
Rammstein


Clique pour voir la fiche du groupe
ou Marilyn Manson
Marilyn Manson


Clique pour voir la fiche du groupe
.

Personnellement, je me suis retrouvé quelques fois en bord de scène, à l’entrée d’une salle ou même à la console des techniciens pour photographier. Autant dire que le travail est dès lors rarement exploitable. Je n’ai pas honte de ranger mon matériel, partir avec une photographie symbolique et dire au manager que je n’ai rien publié. La règle la plus connue est « trois chansons sans flash ». Sauf erreur de ma part, impossible de savoir par qui et quand elle a été instaurée. Parfois elle n’est même pas de la volonté des artistes, mais bien de la production, ou encore de la salle.

Il arrive que nous soyons soumis·es à des contrats, que nous signons et dont nous n’avons même pas la copie pour savoir à quoi nous nous engageons. De manière générale, ils précisent que nous sommes limité·es à trois chansons, que les photographies sont soumises à validation avant publication, qu’il faut définir la destination des photographies (le nom et site du média) et que la revente est interdite en agence.

Je crois même que j’ai signé des trucs pour que mes photos puissent être exploitées commercialement (…). Dans le milieu rock et metal, il y a quelques souplesses selon la production et l’organisateur·trice. J’avais signé un contrat pour Ludwig Von 88
Ludwig Von 88


Clique pour voir la fiche du groupe
et pourtant j’ai photographié tout le concert sans aucune validation au préalable. À l’inverse, Matmatah
Matmatah


Clique pour voir la fiche du groupe
nous avait autorisé toutes les chansons, sauf les trois premières. Et dernièrement, ce fût à Brest avec Mass Hysteria
Mass Hysteria


Clique pour voir la fiche du groupe
, où le band m’a demandé de vérifier les photos avant la publication. Mais il faut aussi dire que Mouss a demandé publiquement sur scène l’accord aux photographes de rester un titre supplémentaire. Une approche qu’il est nécessaire de souligner tant c’est exceptionnel.


// Ludwig Von 88
Ludwig Von 88


Clique pour voir la fiche du groupe


C’est surtout en festival qu’on trouve nos limites. Avec des têtes d’affiche conséquentes, seuls la presse papier ou des médias importants ont accès à la fosse. Ce sont des consignes que l’on trouve à l’espace presse et je rêve qu’un jour, Shoot Me Again aura aussi son nom sur une « shortlist » (rires)

Et constates-tu que le.la photographe doit faire face à de nouveaux obstacles aujourd'hui ?

L’âge d’or où le·la photographe accrédité·e avait accès aux backstages est fini. Tout le monde est capable de prendre une photo et j’en prends pour preuve les centaines de mains levées avec un smartphone.

Quand il n’y a pas de fosse, nous devons être présent·es avec le public. Autant dire que nous ne sommes à ce moment-là pas apprécié·es et il vaut mieux éviter de se retrouver dans un Wall of Death.

Pour un·e photographe quittant le milieu, il y en a dix autres pour prendre ta place. Certain·es acceptent naïvement de céder des photographies pour une mention ridicule sur un bout de papier. Notre travail n’est plus reconnu, à peine valorisé et pour beaucoup nous ne sommes que des « presse bouton » qui profitent de voir des concerts à l’oeil. Entre les droits d’auteur·trice qui ne sont pas respectés et des clauses abusives dans les contrats, j’ai failli moi-même arrêter la photographie en 2016-2017.

Mais malgré ça, il y a une communauté solide de photographes qui se soutiennent mutuellement et qui n’hésitent pas à protester en cas de désaccord.

Pourrais-tu nous faire part de ta meilleure anecdote depuis que tu es chez SMA ?

J’hésite entre deux moments qui m’ont tenu à coeur.

Le premier était au Divan du Monde, en novembre 2016, à Paris. J’avais pris un train sur un coup de tête pour aller voir Ne Obliviscaris
Ne Obliviscaris


Clique pour voir la fiche du groupe
qui jouait avec Enslaved
Enslaved


Clique pour voir la fiche du groupe
pour leurs 25 ans de carrière. Au préalable, j’avais contacté leur guitariste, Benjamin Baret, pour obtenir une accréditation. À mon arrivée dans la salle, mon nom ne figurait sur aucune liste et on me refusait donc l’accès à la salle. Panique totale. La manager d’Enslaved
Enslaved


Clique pour voir la fiche du groupe
déboule et me voilà à expliquer dans un Anglais approximatif que j’avais contacté le musicien par Facebook et que j’avais eu son accord. C’est à ce moment que Benjamin et Tim Charles, le chanteur de la formation, sont arrivés afin de régler eux-mêmes la situation et me donner le précieux sésame, non sans échanger quelques mots et poignées de main.

La seconde, c’était à Strasbourg où, sur un élan d’impulsivité (promis je me soigne), j’avais directement demandé au manager d’Alcest
Alcest


Clique pour voir la fiche du groupe
, en septembre 2018, un pass AAA pour couvrir le groupe sur scène. Une heure avant le concert, le tour manager est venu me chercher devant la salle, m’a donné quelques consignes pour me déplacer pendant les trois premiers morceaux sans interférer avec le groupe. C’était pour moi un honneur d’approcher d’aussi près des musiciens d’une telle influence.

Et puis… allez… j’en ai une troisième, plus personnelle par contre ! C’était en mars de cette année et Haeredium organisait une soirée pour la sortie de leur nouvel album, avec Drak’Maar
Drak’Maar


Clique pour voir la fiche du groupe
, à Colmar. À ce moment dans ma vie, j’avais pris la décision de quitter l’Alsace pour vivre en Bretagne. Un détail qui n’a pas échappé au groupe Drak’Maar,
Drak’Maar,


Clique pour voir la fiche du groupe
qui a décidé d’un entre-deux pour remercier mon travail, me souhaiter un bon déménagement et même de faire une photo finale en leur compagnie devant plusieurs centaines de personnes.


// Solstafir
Solstafir


Clique pour voir la fiche du groupe


De beaux moments en tout cas ! Mais j’imagine qu’il t’est aussi arrivé l’une ou l’autre tuile de temps en temps…

Oh… y en a tellement ! Je pourrais citer les conditions lumineuses, les altercations que j’ai pu avoir avec le public ou même la fois où j’aurai pu être black-listé d’un festival, mais je n’en retiendrai qu’une : Shining
Shining


Clique pour voir la fiche du groupe
.

J’étais en effet venu supporter The Great Old Ones
The Great Old Ones


Clique pour voir la fiche du groupe
au Club de la Laiterie, à Strasbourg, en septembre 2015. Nous sommes à peine une centaine dans la salle, une mobilité correcte pour rejoindre le bord de la scène. Je ne connaissais pas le personnage de Niklas (le chanteur) et je n’avais eu aucune consigne (contrairement au Fall of Summer un an plus tard). Au début, je ne comprends pas ce qu’il se passe sur scène. Le chanteur nous tourne le dos, s’accroupit et refuse même de chanter. Malgré ça, j’en profite pour prendre quelques clichés dégueulasses. J’ai poussé mon appareil à 12.800 ISO et les photographies étaient encore sous-exposées. Tout était éclairé à la lumière LED rouge et verte. Un calvaire !

Perdu dans mes réglages, le chanteur s’approche de moi et pose sa main sur mon crâne. Puis presse, avec un peu plus d’insistance. Un ou deux morceaux suivants, il s’empare d’une bouteille de Jack Daniel, prend plusieurs gorgées et les crache sur le public. Dont moi, évidemment. J’aime beaucoup Shining
Shining


Clique pour voir la fiche du groupe
, musicalement, mais je crois que c’était un des pires concerts de ma vie !

Et pour finir... une petite sélection des meilleures photos prises par Camille !


// Midnight
Midnight


Clique pour voir la fiche du groupe



// Igorrr
Igorrr


Clique pour voir la fiche du groupe



// Hollywood Undead
Hollywood Undead


Clique pour voir la fiche du groupe



// Ghost
Ghost


Clique pour voir la fiche du groupe



Frank Carter & The Rattlesnaks


Blue Blood Basterds
Blue Blood Basterds


Clique pour voir la fiche du groupe

TU AS AIME ? PARTAGE !
Google +
Twitter
Facebook
Whatsapp
E-mail
E-mail
Google +
Twitter
Facebook
AUTEUR : Sekhorium
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près ...
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouve...
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouverez certainement dans la fosse, voire face aux barrières quand le show s'avèrera intense. Plus qu'un style musica...
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouverez certainement dans la fosse, voire face aux barrières quand le show s'avèrera intense. Plus qu'un style musical, le Metal est devenu est philosophie de vie....
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouverez certainement dans la fosse, voire face aux barrières quand le show s'avèrera intense. Plus qu'un style musical, le Metal est devenu est philosophie de vie....

► COMMENTAIRES

Tu dois être connecté pour pouvoir commenter !

Soit en deux clics via Facebook :

image

Soit via l'inscription classique (mais efficace) :

image

► A VOIR ENSUITE