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15 ans de SMA – Isabelle : ''découvrir la personne qui se cache derrière l'artiste''

Jeudi 26 décembre 2019

Tu publies régulièrement des articles où tu proposes des confrontations d'avis. L'occasion notamment de déconstruire certains préjugés qui collent à la peau de celles et ceux qui écoutent de la musique plus dure. Nous ne sommes donc pas qu'une bande d'écervelé·es qui prêchent satan?

Ça dépend de qui tu parles. Tu fais allusion à quelqu’un·e en particulier ?

Plus sérieusement, c’est vrai que les préjugés ont la vie dure. Dès qu’on sort du cadre conventionnel, c’est foutu.

Je constate que celles et ceux qui écoutent de la musique plus dure sont très souvent hyper passionné·es par la musique et la culture alternatives. Et ça va beaucoup plus loin qu’écouter de la musique, ils et elles vivent la musique. It’s a way of life . Elles sont aussi hyper renseignées, documentées et connaissent tout sur les histoires des groupes, des musicien·nes, etc. De vraies bibliothèques !

Je trouve aussi qu’ils et elles sont très réfléchi·es et ouvert·es sur des sujets comme la souffrance animale, l’environnement, la nature, l’art, l’histoire, etc. Donc, non, nous ne sommes pas qu'une bande d'ecervelé·es qui prêchent satan !

Bon, maintenant il y a aussi des con·nes voire des très gros·ses con·nes, mais ça n’a rien avoir avec le style de musique écoutée.

Que retires-tu des rencontres que tu as pu mener ? As-tu pu déjà remarquer un changement dans ta perception de voir les choses ?
J’adore rencontrer des gens dont je ne sais rien ou quasi rien. J’aime aller à la découverte de l’homme ou de la femme qui se cache derrière l’artiste. Ça m’intéresse peu de savoir qu’une personne joue de la batterie, par exemple. J’ai envie de savoir pourquoi, ce qui la motive, quel rapport elle a avec l’instrument, etc. Je cherche toujours à creuser vers l’humain et le personnel. Chez certain·es, on peut creuser plus loin que chez d’autres. C’est en fonction de chacun·e.

Je prépare très peu mes interviews et mes rencontres. J’ai quelques idées ou thèmes en tête et puis c’est parti, on discute et place à l’improvisation. Je rebondis sur des choses qui m’interpellent et qui n’étaient pas forcément prévues.

Quand on me dit ton article était chouette, je réponds toujours que ce sont les personnes interviewées qui le rendent ainsi. Je ne suis que la personne qui retranscrit. Si les personnes que j’interviewe me répondent par oui, non ou tu sais, ce n’est pas intéressant , si elles ne s’ouvrent pas, ça ne marche pas. Quand je dis merci à la fin d’une rencontre, c’est vraiment merci de t’être livré·e, de m’avoir fait confiance, d’avoir partagé des choses avec moi.

Donc, pour en venir à ta question, je retire énormément de choses positives de ces rencontres. Au niveau humain, d’abord. Elles alimentant aussi clairement mes réflexions.

Il faut déjà beaucoup pour que je change d’avis, mais tous ces échanges y mettent de la nuance. Et donc, tout ou presque est toujours en perpétuelle réflexion. Et ça me plait. J’ai toujours envie d’apprendre et de découvrir.

Parfois, je suis étonnée des réponses reçues. Par exemple, pour les female events, je ne m’attendais pas à ce qu’autant d’hommes me disent qu’ils préféraient partager des affiches avec des femmes et qu’ils trouvaient ces évènements inutiles. Ou quand j’ai discuté avec plusieurs roadies, j’ai été impressionnée par leur motivation et leur professionnalisme pour le peu de retour et de reconnaissance qu’ils ont.
Aussi, très souvent, je retire de ces rencontres de nouvelles interrogations et idées d’articles.

À relire : Et Dieu créa les female events -
(http://www.shootmeagain.com/articles/274_etdieucrealesfemaleevents)

Si on t'offrait la possibilité d'interviewer une personne/un groupe, là maintenant, quel serait ton choix ?

Je me demande s’il ne serait pas nécessaire d’interviewer Bernard Minet. Pour remettre les choses en place et comprendre (ou pas) le phénomène. Mais je me dis que ce serait donner de l’importance à un coup marketing qui n’en a sans doute pas plus que celle donnée par quelques ados attardé·es, peu exigeant·es par rapport à la création artistique et à la musique.

Sinon, j’aimerais interviewer Colin H. Van Eeckhout. Sa musique m’impressionne tellement et me procure tant d’émotions positives et négatives que j’ai envie d’en savoir plus sur l’homme. Donc, ce ne serait pas tant pour parler de musique, mais plutôt pour parler de lui, de son regard sur certaines choses, sur sa façon de voir le monde.

Tu es également militante pour plus d'égalité entre les hommes et les femmes. Tu as notamment proposé que SMA rejoigne le projet Scivas. De l'extérieur, la communauté de personnes qui écoutent du rock dur peut paraître parfois machiste, ou du moins fort masculine. Est-ce vraiment le cas ?

Ça me parait important d’agir pour qu’on ne fasse plus de différences entre les hommes et les femmes artistes. Avec Scivias, on travaille à une meilleure représentation des femmes dans le monde de la musique en espérant que Scivias n’ait plus de raison d’être dans quelque temps.

Au niveau de la communauté, il y a des con·nes voire des très gros·ses con·nes qui ne comprennent pas l’intérêt et qui ont une image très réductrice de la femme, de sa place dans la société et de l’être humain de manière globale. Ils·elles ont surtout une mauvaise image d’eux·elles-mêmes, mais là on tombe dans la psychologie. De manière générale, la communauté, fort masculine comme tu le dis, est ouverte et volontaire sur le sujet. Les choses évoluent. Ça se sent.

De manière plus large, j’en ai marre qu’on qualifie l’être humain par des adjectifs réducteurs qui n’apportent rien à sa personnalité comme le sexe, la couleur de peau, le régime alimentaire, les préférences sexuelles, les convictions religieuses, le statut marital, si on est parent, beau, moche, tatoué, handicapé, ou autre. Tu es Pierre et je suis Isabelle. Point barre.

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