Chronique

EHNAHRE
The Marrow

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Painted Throat Music

4 titres - 52min
Sorti le 25-08-2017


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Vendredi 18 août 2017

On écoute de la musique pour en éprouver la capacité de nous divertir, de nous faire bouger sur des rythmes simples et répétitifs qui concordent avec nos humeurs mélangées. Mais quelquefois l'on en veut davantage. Alors...
On écoute de la musique pour en éprouver la capacité de nous communiquer des idées, des opinions qui bouleverseront nos acquis et en redéploieront la voilure. Mais quelquefois l'on en veut davantage. Alors...
On écoute de la musique expérimentale pour en éprouver la capacité de nous extraire momentanément de notre univers acoustique habituel, de nous en barbouiller l'audition pour nous faire connaître le même monde par la partition d'une autre personne. Mais quelquefois l'on en veut davantage. Alors...
On écoute de la musique d'avant-garde pour en éprouver la capacité de nous laisser entr'ouïr le cosmos sonore à venir, de nous laisser chercher des réponses à des questions qui n'ont pas encore été posées. Mais quelquefois, à force d'en vouloir davantage, l'on arrive au bout du chemin. Sauf si...
On écoute Ehnahre
Ehnahre


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. Le quatuor de Boston est de retour avec un cinquième LP, The Marrow, qui met en notes un poème dans lequel l'auteur, Theodore Roethke, considérant sa propre « mortalité », semble ne plus vouloir éviter les questions relatives à l'éventuelle spiritualité du « quoi », du « où » et du « comment ». Le groupe de Ryan McGuire s'empare du texte pour recréer, en quatre longues plages, pour quatre strophes du poème, les conditions sonores des atermoiements d'un athée hésitant. Tout commence et tout finit par l'archet frottant, tapotant, arrachant la basse de McGuire qui dilue longuement la lourde sensation oppressante du vide relatif et de l'absence de signification d'une existence qui se contente d'être... Les vocaux plaintifs récitent le début du texte (The Crow Speaks) sur ce tapis, de moins en moins insouciant, où se chamaillent les drums et les percussions de Joshua Carro (le nouveau batteur du groupe) jusqu'à la neuvième minute lorsque tous se retrouvent pour un moment rappelant les premières amours « post-bm » de Ehnahre
Ehnahre


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. Les sept dernières minutes de ce premier titre laissent traîner les arpèges suspendus de la guitare de Richard Chowenhill tandis que la contrebasse pincée par Ryan McGuire semble tâtonner pour ne pas poser de fâcheuses questions inaudibles...

A Wandering Fire et Godhead continuent de tordre les instruments pour éprouver, jusqu'à l'infini, la ductilité des sons... la ductilité du temps sonore. La ductilité du temps humain ? Le piano de Jared Redmond suspend, pour un instant seulement, le chaos organisé (Godhead) tandis que Ryan McGuire murmure aux univers des questions que l'on entendra que plus tard. La résolution est proche.
Ce sera The Marrow, doux vestige introspectif d'un être apaisé qui semble susurrer : « je ne sais pas ce qui se passe dans ce monde, mais c'est beau et confus... et je regrette parfois la façon dont j'ai vécu ma vie. »

Avec The Marrow, Ehnahre
Ehnahre


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réussit à désincarner un peu plus encore sa musique pour créer, à l'instar de ces acousticiens qui génèrent la fréquence idoine afin de neutraliser les sifflements d'un acouphène, un solde sonore en négatif qui ressemble à s'y méprendre aux bruits de nos propres tourments. On n'écoute pas Ehnahre
Ehnahre


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, démiurge instigateur de notre univers musical intime ; c'est Ehnahre
Ehnahre


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qui nous écoute...
Un chef-d’œuvre.


Tags : Avant-garde, expérimental
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