Interview

LETHVM

un nouveau palier, des changements salvateurs


Jeudi 26 septembre 2019

C’est à la fin du mois de novembre 2017 que Lethvm
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a commencé à percer, armé de son album This Fall Shall Cease. Déambulant aux frontières du black metal et du doom, ce premier effort est plutôt bien reçu par la critique. Les concerts s’enchaînent, en Belgique et ailleurs. Nous sommes aujourd’hui presque deux ans plus tard et dans une poignée de jours, Lethvm
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sortira son nouvel LP, Acedia. De nouvelles expériences, de nouveaux visages, on nous laisse entendre que le groupe a évolué et ne sonne plus tout à fait comme avant. Comme on est une bande de curieux et de curieuses, on est donc allé les voir. Chez eux.



Théoriquement, c’est encore l’été. Sauf que ce lundi de septembre pourrait être tiré du plus profond de l’automne, tant il fait gris et qu’une fine pluie s’abat en discontinu sur le paysage agricole en périphérie namuroise. Les étroites routes s’enchâssent les unes aux autres, même le GPS finit par en perdre ses datas. Me voilà donc finalement escorté au lieu-dit, un petit local d’une dizaine de mètres carrés où s’entassent amplis, batterie et guitares. Les mines ne sont pas celles des grands jours : Nicola, le guitariste, est tombé en panne sur l’autoroute alors qu’il était prévu que j’assiste à la répétition du show qu’ils donneront à l’occasion de la release party, au Botanique. Mais évidemment, sans guitariste, ça se sent légèrement le sapin. Bon on va écouter l’album chez moi?, lance Tony, le batteur.

Tout le monde prend place face à un mur où sont accrochées des dizaines de photos, vestiges d’un tas de souvenirs amoncelés par le temps. Un Mac trône au milieu d’une table, relié à des enceintes. Le silence et l’écoute attentive deviennent de rigueur. Une bière me tombe dans la main, un stout anglais. On ne peut mieux pour profiter. Les morceaux s'enchaînent, j’écris ce qui me passe par la tête. Quelques notes au piano signent la clôture de l’album. Les dix secondes qui suivent la fin d’un opus sont toujours étranges, tel un sas de décompression permettant de revenir au réel. Et c’est peu dire : je m’en vais soulager ma vessie, avant de parler musique avec mes compères du jour.



Je me souviens d’avoir composé ''Fatigue'', ou du moins les bases, avant même que le premier album ne sorte. On s’est donc dit que ce serait bien que le nouvel album commence par ce morceau, histoire d’assurer une transition, explique Vincent, le vocaliste de la formation. Car en effet, la suite de l’opus opère un virage vis-à-vis des précédentes compositions, sorties il y a deux ans. Titres plus lents, plus sombres. Et puis cette couche mystique et spirituelle qui s’insinue partout où elle le peut. Bon… nous, on appelle ça plus simplement des ambiances, explique Vincent en se marrant. Mais c’est vrai qu’on a toujours moins de recul par rapport à ce qu’on fait, par rapport à quelqu’un qui ''écoute''. On a en tout cas essayé d’y mettre des ambiances qui nous parlent. C’est surtout Nicola qui se charge de cela.

Et puis on en vient évidemment à discuter du titre de l’album, qui peut apparaître énigmatique pour les profanes. Tony explique : à la base, Acedia désigne un ancien pêché capital dans la religion catholique. C’est le fait pour un moins d’être dévié de sa quête spirituelle, d’être distrait de sa pratique. Après… chacun y verra ce qu’il veut, mais on peut clairement faire un lien avec la société dans laquelle on vit : une acédie contemporaine afin de sortir de l’oppression dans laquelle on vit. Un peu donc comme à l’époque où un moine osait sortir de ce carcan imposé par la religion. Lethvm
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s’amuse donc ici à prendre la signification de l’acédie à contresens, non plus comme un pêché, mais bien comme une forme de libération. La première fois que j’ai lu ce terme, c’était dans un article qui faisait l’apologie de la paresse. En italien, il y a deux mots pour exprimer la paresse. Il y a celui pour désigner la personne qui ne fout rien de sa vie, et puis il y a acedia, en vieil italien. Ce sont ces moments pour prendre du temps, pour revenir vers soi-même et réfléchir aux choses. Il est aujourd’hui nécessaire de parfois ne rien faire, c’est là que naissent certaines bonnes idées. Il faut réapprendre à ne rien faire, toute l’importance de l’ennui.



Un concept qui se traduit également visuellement, avec la pochette de l’album. Tony en dit un peu plus : elle représente une femme de verre, debout dans une chambre. Il n’y a qu’une table, à droite, ainsi qu’une fenêtre et la lumière qui pénètre dans la pièce. Chacun y voit ce qu’il veut, mais moi ça m’a fait penser à une nonne dans sa cellule. Libérée du carcan catholique par l’acédie, elle deviendrait cristalline. La conception de l’artwork de cet album a été confiée à Dehn Sora, un artiste multidisciplinaire qui, outre ses talents graphiques, est également connu pour être musicalement derrière Treha Sektori
Treha Sektori


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Throane


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et Ovtrenoir
Ovtrenoir


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. Une réalisation qui a demandé une certaine dose de travail, la requête originale n’étant pas très explicite. On lui a soumis l’idée d’une d’une femme affalée en effet de gravure, avec une pose nonchalante et avec un corps mi-jeune mi-vieux, raconte le batteur, partageant un accès de rires avec Vincent, avant que ce dernier ne poursuive :… et bon au final, ce n’est pas du tout ça! Mais je crois qu’il a bien compris notre intention et ses remarques nous ont aussi bien fait réfléchir.

Des cogitations, c’est visiblement quelque chose qui n’a pas manqué pendant ces deux années les séparant de leur premier album. Quand on évoque le processus de composition, Vincent confie : ça a été long, très long. Tony enchérit de suite, expliquant que beaucoup de rifs ont été composés, mais qu’énormément ont ensuite été éliminés afin de ne garder non seulement les meilleurs, mais aussi ceux qui permettaient à cet LP de respecter un fil rouge. Je pense que pour chaque chanson, je dois en posséder entre trente et quarante versions. Des fois, ce n’est qu’un rif de basse qui change, mais ça donne une idée du travail sur chaque titre, raconte le vocaliste.



Et puis Acedia, c’est aussi l’aboutissement de quelques changements de line-up, salutaires selon les deux têtes pensantes de la formation. Un pas décisif afin d’oser de nouvelles choses, de sortir de leur zone de confort. C’est tout d’abord Ben, le bassiste, qui quitte le groupe. Mathieu lâche alors la guitare et s’empare de la basse. Nico entre dans Lethvm et en devient le gratteux. Puis Mathieu nous a annoncé son départ le 15 juillet. Une semaine plus tard, Jean-Pierre était déjà là pour participer à la première répétition. Un musicien qui n’est d’ailleurs pas un inconnu du milieu : Lamiral
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, El Comer Ocho
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, Jesus Project
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Volver


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ou Negate
Negate


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. Je suis également ami avec Mathieu, on s’était croisé à un concert de Lamiral. Il m’avait déjà dit qu’il n’avait plus beaucoup de temps pour le groupe, qu’il ne savait pas s’il allait encore continuer. Et moi, de mon côté, j’avais envie de me réinvestir à fond dans la musique. Lors d’une discussion avec Nico, je lui avais glissé que s’ils cherchaient un second gratteux ou que si une place se libérait, j’étais très intéressé, raconte Jean-Pierre. Et puis les étoiles se sont alignées, le départ de Mathieu arrive à ses oreilles, quelques échanges de courriel et le tour est joué.

L’homme est également connu dans un autre milieu, celui du tatouage. Propriétaire du Grizzly inc., un salon de tattoo bien connu à Liège, et lauréat du Mondial du tatouage à Paris en 2016, Jean-Pierre a pourtant annoncé vouloir ranger ses aiguilles. Je ne mets pas en pauses toutes mes activités de tatoueur, c’est juste que je ne tatoue plus pour le moment. J’organise toujours des activités autour du tatouage et je continue à gérer ma boutique. Mais ça me laissera donc beaucoup plus de temps pour la musique… et puis même pour le tattoo, si un jour je dois y revenir, je pense que cette pause est nécessaire, ça va me faire du bien.


Acedia sortira le 10 octobre prochain. C’est également ce jour- là qu’ils défendront les sept nouveaux morceaux que comporte cet album, sur les planches bruxelloises du Botanique. L’aboutissement de deux années de travail, qu’il n’est pas question pour eux de prendre à la légère. Il y a deux ans, Lethvm
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avait remporté le LOUD contest, un concours organisé tous les deux ans et visant à mettre en lumière des formations de metal en Fédération Wallonie-Bruxelles. Suite à cela, ils avaient obtenu la possibilité de se rendre en résidence afin de perfectionner leurs shows. Un processus qu’a voulu réitérer le groupe, en programmant une résidence au Belvédère de Namur avant la release party. L’argent qu’on gagnera lors de notre concert au Botanique, on l’a déjà réinvesti pour mener à bien cette résidence. Après le Loud, ça nous avait permis de mettre le doigt sur ce qui fonctionnait et sur ce qui ne fonctionnait pas. Ça avait fait évoluer notre façon de jouer, raconte Vincent. Le son, les lights, l’attitude scénique seront passés à la moulinette pendant ces deux journées intensives. Et puis le tout sera analysé par un œil extérieur, celui de Tino De Martino (Channel Zero
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) qui endossera à cette occasion le rôle de coach. Ce mec, c’est un vrai musicien. Lorsqu’on enregistrait avec Lamiral (ndla : Vincent était alors le chanteur de la formation), Tino s’est ramené au studio, sans avoir vraiment écouté les morceaux au préalable. Il est juste arrivé et a tapé des basses incroyables. Il a la musique dans la peau, il sent les choses tout simplement. Il a nous a semblé évident de lui demander de nous guider pendant ces deux jours, il comprend la musique et ça ne pourra que nous aider.
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AUTEUR : Sekhorium
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près ...
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouve...
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouverez certainement dans la fosse, voire face aux barrières quand le show s'avèrera intense. Plus qu'un style musica...
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouverez certainement dans la fosse, voire face aux barrières quand le show s'avèrera intense. Plus qu'un style musical, le Metal est devenu est philosophie de vie....
Chargé de communication dans le secteur culturel et journaliste à ses heures perdues, Pierre explore les méandres du Metal depuis maintenant près de 20 ans. Privilégiant les sensations au détriment de la raison, il recherche sans arrêt de nouvelles formations qui viendront titiller les cinq sens. Si vous le croisez en concert, vous le trouverez certainement dans la fosse, voire face aux barrières quand le show s'avèrera intense. Plus qu'un style musical, le Metal est devenu est philosophie de vie....

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