Reportage

Wilco : Prestation 50 étoiles !

Bruxelles (Ancienne Belgique), le 12-06-2019

Jeudi 4 juillet 2019



Dans la grande famille du rock alternatif aux expérimentations country-pop, je demande Wilco
Wilco


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! Malgré l'absence d'un nouvel album, Jeff Tweedy et sa bande ont repris la route et étaient de passage à l'Ancienne Belgique pour deux délicieuses soirées à guichets fermés. L'idéal pour se délecter de divines envolées de guitares improvisées, de ballades lancinantes et envoûtantes et ainsi nous voir offrir le meilleur condensé du rock américain dans tout ce qu'il possède de plus diversifié. Avec un humour aussi grinçant que génial, ces troubadours ont toujours soigneusement évité de se laisser enfermer dans des cases bien définies. Cela étant, Wilco
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n'en demeure pas moins l'un des groupes les plus intransigeants et consistants de sa génération, véritable machine à sublimer les anxiétés d'une époque en friandises folk pop gorgées de soleil et idéales pour se refaire une santé (mentale). Cette dernière a d'ailleurs longtemps torturé le sensible Jeff Tweedy en proie aux grondements d'une perpétuelle tempête interne. Mais c'est justement cette vaste palette stylistique, faisant de chaque enregistrement une plongée dans l'inconnu, qui lui a permis de se sortir de son marasme le transformant en un besoin vital qui exige de toujours se surprendre et enfanter ainsi de nombreuses perles à la beauté flamboyante. Se pencher brièvement au bord de précipices embrumés pour mieux s’envoler vers un état de grâce coloré et éclatant. Pendant près de deux heures, Wilco
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va nous en faire une démonstration et submerger l’AB d'impeccables et audacieux morceaux faisant honneur à son titre de ''groupe le plus libre'' encore en activité.


Si la salle peine encore à se remplir en ce début de soirée, nous sommes bien en place afin d'accueillir l'artiste chargé de la première partie et dont le CV impressionne par ses imposants états de service : Ken Stringfellow. Le gaillard est entre autres le co-créateur du duo The Posies, musicien de session chez R.E.M. ou encore responsable du retour du mythique Big Star sur le devant de la scène peu de temps avant le décès d'Alex Chilton. Et comme si cela ne suffisait pas, il a notamment collaboré sur album ou sur scène avec des gens aussi illustres que Neil Young, Marky Ramone
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, Thom Yorke, John Paul Jones, Patti Smith, Ringo Starr, Nada Surf
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ou encore Mudhoney
Mudhoney


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, apparaissant sur un peu plus de 250 albums studio (rien que ça !). Un homme qui a donc fait ses preuves, ouvrant les vannes de la power pop aux States en façonnant une discographie des plus respectables. Mais force est de constater qu'il ne va pas jouer assez fort que pour arracher les spectateurs des bars de la salle où ils semblent préférer passer le temps. Et pour cause, un jeu assez sombre, doucereux, presque hors du temps, passant du piano à la guitare afin d'illustrer des textes personnels mais habités. Une petite collection de chansons dont les influences vont de la pop pure au jazz, en passant par le surf rock façon Beach Boys ou encore des mélodies acoustiques épurées. Le capital 'sympathie' du musicien augmentera d'un cran notamment pour la chanson Night Time (reprise de Big Star) ou encore la venue sur scène de la chanteuse belge An Pierlé
An Pierlé


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, venue poser sa voix sur les deux derniers titres joués, mais d'une manière générale cette pop sophistiquée et le caractère intimiste du set n'auront pas ému plus que cela l'assemblée qui n'a d'yeux que pour les baladins de Chicago.



C'est devant un décor des plus neutres et des plus sobres qui soit (seulement trois tapis recouvrant le sol) que s'avancent nos six bardes du soir. Occupant l'avant-scène et laissant derrière eux un immense vide, on ressent immédiatement ce besoin de communion, d'établir un lien de confiance et d'intégrité avec ceux qui vont les écouter. L'accent semble être véritablement et exclusivement mis sur la musique. On s'étonne même de l'absence du chapeau de cow-boy sur la longue tignasse grisonnante de Jeff Tweedy. Après un bel accueil de son public, le groupe entame timidement Hell Is Chrome, tranquille et presque silencieuse complainte s'évaporant aux sons des ''Come With Me'' scandés inlassablement par ce diable de Jeff pendant que Nels Cline laisse pleurer de désespoir sa guitare inconsolable. Le décor semble planté et pourtant nous voici secoués dans tous les sens par I Am Trying to Break Your Heart pour lequel le band joue immédiatement son va-tout : une chanson aux allures de classic rock amerloque ornée de bouquets garnis country-folk mais dont les coutures commencent soudainement à se déchirer aux entournures, se laissant ainsi transpercer par de nerveuses saccades de guitare et une batterie en folie sous un délire stroboscopique. Glenn Kotche semble possédé et fait résonner son engin tel une machine infernale. Après un tel ramdam, le soulagement et le rafraîchissement nous arrivent en droite ligne de Kamera et son xylophone envoûtant ou encore le dévouement féroce et répété de I'll Fight, sorte d'écho au mythique I Want You de Bob Dylan
Bob Dylan


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.

Sur le très applaudi Handshake Drugs, Nels Cline excelle et régale l'assemblée avec un long solo tel un Thurston Moore
Thurston Moore


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des grands soirs qui répond parfaitement à la basse gonflante de John Stiratt. Il y a d'ailleurs fort à parier que The War On Drugs
The War On Drugs


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ont certainement dû se passer ce morceau en boucle lors de leurs premiers balbutiements. On est scotché par la symbiose et la maîtrise de chacun des membres du groupe que ce soit sur le subtil et rythmé Hummingbird au piano émoustillé ou beaucoup plus tard sur Impossible Germany et son solo délicat. Pas de longs discours entre les morceaux à l'horizon si ce n'est quelques plaisanteries à l'humour piquant comme cette réprimande à un spectateur qui entonne un morceau à la place de Tweedy railleur : « Eh c'est MA partie à chanter ! ». La réaction hilarante de l'assemblée nous porte à croire qu'une reconversion du chanteur en tant que comédien est toujours possible. Nous en aurons encore un exemple dans quelques instants. Mais avant cela et après avoir salué ''le type qui était derrière eux dans l'avion'', le groupe nous propose un énorme retour en arrière avec deux morceaux issus de leur toute première galette (« A.M. ») sortie en 1995 : Shouldn't Be Ashamed et I Must Be High, premiers témoins d'une honky tonk pop gluante particulièrement appréciée des collégiens de l'époque, ainsi que le sarcastique How To Fight Loneliness.



C’est alors que notre homme, champion du monde aux J.O. du Sarcasme, remarque la présence au premier rang de fans brésiliens venus spécialement pour l’occasion : « Il n’y a pas assez de concerts au Brésil que pour venir vous perdre ici ? » dit-il avant de remarquer un dessin réalisé par l’un d’entre eux : « Vraiment merci pour cette affreuse caricature de moi-même, t’as fait ça toi-même ? Dégage d’ici ! » sous les rires du public et des fans en question. Ou encore quand il proposera au public de chanter un refrain avec lui : « Vous pouvez chanter ce morceau avec moi si vous le voulez… ou pas », un spectateur l’interrogera ainsi : « Que préfères-tu ? », ce à quoi il répondra : « Ce que je préfère ? Que tu ne me poses pas de question… ». Un humour pince-sans-rire loin d’être insupportable tellement le gaillard inspire une énorme sympathie derrière son sourire narquois.

On enchaîne dans la bonne humeur sur deux morceaux issus de l’album « Mermaid Avenue » de 1998, paisible parenthèse dans leur carrière au cours de laquelle ils vont s’atteler à mettre en musique des textes inédits de Woody Guthrie en collaboration avec le working class hero Billy Bragg : California Stars et Hesitating Beauty, résolument folk de par l’utilisation du banjo. Une belle leçon maîtrisée de bluegrass et d’americana comme on la chérit tant. Mais le plus impressionnant reste à venir ! Bull Black Nova, et ses passages bruitistes expérimentaux soulignés par d’intenses lights d’une rougeur sanguine, rugit tel un moteur tournant trop hâtivement avant de chavirer dans un chaos de synthétiseurs. Après quoi, c’est Laminated Cat, du side project Loose Fur regroupant Tweedy et Glenn Kotche, qui est choisi pour continuer dans cette mouvance de sons triturés et légèrement psychédéliques. Tweedy demandera à plusieurs reprises si de courageux parmi l’assemblée seront également de la partie pour le show du lendemain qui sera totalement différent au niveau de la setlist. Pas de bol, on loupera Misunderstood pour lequel nous avons personnellement un petit faible… La suite n’est qu’un enchaînement de chansons lancinantes et contemplatives à l’instar du modeste Reservations pour lequel personne dans la salle n’ose pousser la chansonnette de peur de briser l’harmonie du combo, et ce, malgré un long et planant temps mort où même le silence semble s’écouter. Wilco
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n’a pas oublié ses bonnes manières concernant sa façon de proposer un rock compact comme sur Someone to Lose aux pulsations séduisantes ou encore Born Alone et ses courbes folles sur lesquelles il nous est impossible de rester tranquillement en place. Leur génie réside également dans leur aptitude à faire évoluer des morceaux pourtant calmes et flegmatiques vers d’intenses fracas sonores où la bienséance n’est plus de rigueur, At Least That's What You Said en est d’ailleurs l’exemple le plus frappant. Le set se termine sur The Late Greats avant un rappel tonitruant prouvant que le public ne veut certainement pas en rester là et qu’il reprendrait bien une rasade de ce merveilleux remontant. Et il va être servi puisque ce ne sont pas moins de cinq chansons qui seront interprétées par la suite. Un erratique Dawned On Me, un Random Name Generator tripant avec ses rythmes boogie seventies pépères, un Jesus, Etc. rassembleur, un Heavy Metal Drummer mélangeant mélancolie et euphorie, et enfin I’m The Man Who Loves You comme merveilleux message d’adieu à un public qui l’a bien mérité.



Capable de passer du rock le plus frontal à une pop des plus pures, de sauvages envolées acides à d'intrépides expérimentations électroniques, de se perdre entre groove synthétique et explosion électrique, Wilco
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est un de ces diamants bruts dont on voudrait qu’il soit éternel. Avec brio, ils nous ont donné, ce soir de juin, la preuve qu’ils n’ont justement plus grand-chose à prouver quand il s’agit de mélanger tradition et modernité. Du tout grand Art !

Remerciements à Live Nation

Photos live : Geert Vandepoele (Enola magazine) (Bedankt !)

http://www.enola.be/2019/06/12/wilco-2/
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AUTEUR : Panda
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, pas...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...

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