Reportage

Colour Haze : Ça teutonne ?

Bruxelles (Botanique), le 15-11-2023

Dimanche 19 novembre 2023



Il est peu de dire qu’en près de 30 années d’existence, Colour Haze
Colour Haze


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est devenu bien plus qu’une institution au sein de la musique underground. Ancêtres d'un stoner psychédélique qui a influencé toute une génération de musiciens, les Munichois continuent de marquer les esprits à l’aide de rythmes fluides, de mélodies immersives et de tonalités chaleureuses, incarnant un véritable esprit jam tout en restant enracinés dans le rock progressif et le heavy classique. Avec leur récent « Sacred » qui parvient à condenser le meilleur de leur savoir-faire, les Allemands réalisent la passe de 14 et atteignent ainsi les sommets les amenant sur un piédestal encore plus haut qu’espéré. Seul le temps nous le dira, mais il s’agit peut-être de l’album définitif du Haze : une sorte de ‘Greatest Hits’ dont l’intégralité du contenu est pourtant composée de matériel original. Culte avant l’heure… De quoi nous inciter, que dis-je, nous obliger à rallier coûte que coûte l’Orangerie du Botanique où le groupe a donné rendez-vous à son public pour une soirée haute en couleur et en distorsions lumineuses…


Mais tout d’abord, nous sommes accueilli.e.s par Swan Valley Heights
Swan Valley Heights


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également originaires de la bonne vieille Bavière. Au risque de paraître désagréable d’entrée de jeu, force est de constater que la musique du combo, qui mélange des accords psychédéliques teintés de stoner avec une attitude empruntée au grunge et au rock alternatif, ne va pas marquer les esprits. Certes, l’exécution est propre, carrée et maîtrisée, sans fausse note et sans aucun pain de batterie, mais le contenu proposé est bien trop dans l’air du temps et manque cruellement d’originalité. S’il paraît bien difficile de se frayer un nouveau chemin dans un genre aussi cadenassé que le stoner rock, on ne peut certainement pas reprocher au groupe de tenter ce qu’il peut pour nous emporter dans son univers. On aurait sans doute aimé un peu plus de fuzz par moments et les mid tempos manquaient cruellement de saturation. Un manque d’excès qui, pour une fois, fait terriblement défaut. On appréciera tout de même le jeu de tam-tam original proposé par le batteur en début de show ou encore les parties vocales du chanteur/guitariste relativement discrètes et éthérées apportant une touche toujours juste sans jamais verser dans le dégoulinant et le pathos. Quarante minutes qui, bien qu’agréables, auront plus un parfum anecdotique que réellement mémorable… Il manque juste ce petit ‘je-ne-sais-quoi’ qui sortirait des sentiers battus pour être pleinement apprécié à sa juste valeur. À mûrir et à peaufiner !



Une petite binouze plus tard et nous revoici prêt.e.s à déguster le plat de résistance que nous a concocté Colour Haze
Colour Haze


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et surtout curieux.ses d’observer ces échanges dynamiques entre la guitare et les claviers qui ont rendu leurs dernières œuvres si aventureuses et savoureuses. Toujours mené par le guitariste/chanteur et fondateur Stefan Koglek (également dirigeant du label Elektrohasch Records sur lequel le band est signé) ainsi que le batteur de longue date Manfred Merwald, le groupe a réorganisé sa formation ces dernières années accueillant ainsi Jan Faszbender aux claviers et Mario Oberpucher à la basse. On sait que le quatuor a une propension naturelle à créer des paysages sonores luxuriants, passant de leads sinueux à des grooves labyrinthiques avec une aisance décomplexée. C’est après quelques minutes de rodage que la machine se met en marche avec Turquoise, charmant instrumental à la légèreté aussi chaleureuse que fantaisiste, apportant déjà une sensation de calme et de plénitude. Toutes les caractéristiques du son de Colour Haze
Colour Haze


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sont là, avec la quantité parfaite de dérives emphatiques. Un morceau qui enfle de plus en plus dans sa progression et dont on sait déjà qu’il n’est que le teaser du spectacle à venir. Manfred Merwald et sa batterie sont placés de profil et font face à tout l’attirail du tapoteur de touches qu’est Jan Faszbender, comme pour se créer une alchimie qui n’appartiendrait qu’à eux. Stefan Koglek, placé légèrement à l’avant-scène et le visage dissimulé sous sa longue crinière, jette de nombreux regards vers ses comparses et entame Goldmine pour lequel arrive cette jolie guitare aussi bourrue qu’un visage qui ne s’est plus rasé depuis quelques temps. Un morceau fluide à la Kyuss
Kyuss


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et au riff nostalgique nous renvoyant aux premières heures du stoner rock et dont on aurait aimé qu’il dure une éternité mais qui s’arrête bien trop brusquement, de quoi provoquer un sentiment de frustration tant l’osmose entre le groupe et son public était palpable jusqu’alors. Mais n’ayons crainte… Car tous les fantasmes sont plus que jamais d’actualité et l’on croit rêver quand les premiers accords de Aquamaria se font entendre ! Le classique des classiques nous présente le groupe en plein essor et c’est tripant de bout en bout : une ligne de basse émergente qui fournit la base solide pour une guitare subtile qui suit de près, offrant un mirage brumeux aux spectateurs qui se trouvent là. Il devient vite évident que ce n'est que la pointe de l'iceberg, alors que la batterie parvient à se faufiler dans cet enchevêtrement nébuleux. Nous voici donc déjà embourbé.e.s dans une puissante tempête de sable qui engloutit tous nos sens. On se raccroche autant que faire se peut à cette voix fluette et bourdonnante, dernier point de repère pour nos esgourdes égarées. Magistral !



On rejoint les années 70 ensuite avec les jams groovy et hypnotiques (presque krautrock) orchestrées par la doublette Skydancer-Skydance rendant hommage à leurs illustres prédécesseurs que sont Birth Control, Amon Düül II, Blue Cheer ou encore le Grand Funk Railroad. Un trip sauvage avec des claviers sous stéroïdes mais à l’extrême bon goût. C’est lourd, excitant, couillu. À ce stade du show, impossible de ne pas évoquer le primo-arrivant Mario Oberpucher, fanfaron de service qui est sans aucun doute l’ingrédient de la recette qui injecte le plus d’énergie et d’urgence à un ensemble fort décontracté. Mention spéciale également à l’éclairage et au soin apporté aux jeux de lumières hypnotiques qui confèrent une atmosphère parfaite et propice aux élucubrations enfumées. Arrive alors un nouveau morceau au titre amusant (Ideologigi) qui débute par un sensible son de piano électrique très Soft Machine avant que ce dernier ne soit repris par une guitare imprégnée de fuzz et une interaction basse-batterie dantesque. On retrouve une nouvelle fois le talent qu’a le groupe pour nous procurer une lente émotion avant de nous embarquer dans un voyage secouant et aventureux à souhait. Habituellement, ces morceaux plus longs ont des accumulations prolongées à outrance, mais Colour Haze
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sait jouer la carte de la variété. Au milieu de cette épopée de près de 9 minutes, les gars se lancent dans un jam hypnotique, entrant sur le territoire de Motorpsycho
Motorpsycho


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: une série de solos bruyants s’ensuit avant que les couplets les plus percutants ne reprennent le volant. Décoiffant ! La voix hybride de Koglek fait le pont entre Geddy Lee (Rush) et Jon Anderson (Yes
Yes


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) et tente tant bien que mal de s’extraire de cet épais brouillard psychédélique. Si l’intro du frénétique et sautillant Überall est complètement massacrée, non pas par le groupe lui-même mais bien par une partie du public qui se croit être en plein cœur du marché de Saint-Josse (putain, fermez vos gueules ou sortez pour causer !), le magnifique crescendo de Transformation est à se damner ! La guitare, de prime abord rêveuse se transforme en furie et devient de plus en plus bruyante et intense. Toute cette tension électrique reste toutefois contenue avant cette explosion de hard rock bouillonnante qui finit par s’effondrer sur elle-même. Tout bonnement indescriptible. L’heure officielle de la fin du concert étant quelque peu dépassée, on ne s’attend pas à voir réapparaître le groupe. C’est bien mal connaître nos amis germaniques qui vont nous offrir pas moins d’une demi-heure de rab. Excusez du peu !



On se quitte donc avec un Tempel au riff pur et un Love quelque peu tiré en longueur mais on ne va certainement pas bouder son plaisir. La foule reconnaissante acclame méritoirement le responsable de ce trip cosmique et langoureux. Il y a fort à parier que sans Colour Haze
Colour Haze


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, le heavy rock psychédélique ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. Leur discographie est un chemin tortueux mais sur lequel nous trouvons constamment les repères nous permettant de participer à de merveilleux périples. Il est un baume pour les journées difficiles, encourageant l'imagination à l’aide de parties instrumentales évocatrices et expressives d’une sérénité qui tient bon même dans les moments les plus déboussolants. D’une profondeur sans pareil, le groupe navigue entre rebondissements vertueux et divergences inattendues et possède néanmoins un pur groove ultime comme rarement entendu auparavant.

Deutschland über alles… ? Ce soir, assurément !

Remerciements au Botanique
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AUTEUR : Panda
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, pas...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...

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