Reportage

Quand Carcass sonne, il nous fout la Trix !

Anvers (Trix), le 15-01-2025

Lundi 20 janvier 2025




En ce début d’année 2025, les Anglais de Carcass
Carcass


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nous ont offert un bien beau cadeau en programmant sur le sol belge la toute première date de leur Rigor Mortis Tour ! Déversant leur son emblématique dans un Trix Club bondé, le groupe n’a pas pour autant dissipé le brouillard extérieur et a une nouvelle fois prouvé son statut d’icône dans la sphère metal extrême à l’aide de riffs complexes à l’intensité brutale mais surtout d’une précision chirurgicale. Du death’n’roll au groove décapant dont nous nous sommes délectés avec jubilation. Embarqués dans leurs valises, les non moins cultissimes Brujeria
Brujeria


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venus proposer leur deathgrind à la sauce latino et aux paroles politiquement touffues ainsi que les Finlandais grindcoreux de Rotten Sound
Rotten Sound


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, connus et reconnus pour leur vélocité et leur rudesse implacables, n’ont toutefois pas manqué de faire monter les degrés Celsius ! Une soirée immanquable et exaltante à plus d’un titre !


Nous entamons donc les hostilités avec Rotten Sound
Rotten Sound


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, passés maîtres dans l’art d’un grindcore classique à la scandinave du style Nasum
Nasum
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mais avec une bonne grosse attitude punk. Eux, qui continuent la promotion de leur huitième galette (« Apocalypse ») parue il y a bientôt deux ans, vont proposer une formule parfaitement exécutée canalisant toute la violence sonore et le caractère particulièrement explosif de leurs morceaux. Un barrage condensé de chaos et de carnage pour déjà punir les premiers venus qui se massent aux abords de la scène. D’entrée de jeu, le groupe frappe fort en balançant deux titres issus de l’album « Cursed » paru en 2011 à savoir Self et Power, ce qui permet d’admirer immédiatement le travail guitaristique du génial Mika Aalto, seul membre fondateur encore présent aux côtés du hurleur Keijo Niinimaa. Il ne faut que quelques minutes avant qu’un spectateur n’apostrophe discrètement ce dernier afin que l’on augmente le son de son instrument, ce qui a d’ailleurs l’air de l’amuser. Il va de soi que la majorité de la setlist sera consacrée au dernier méfait commis par les Nordiques qui enchaînent par une collection de courts morceaux bruts et ramassés. Malgré la durée de ceux-ci, la musique du combo est clairement réfléchie, tenant compte d’un nombre important de facteurs subtils tels que l’impact, la dynamique, la retenue même (!) sans oublier une propension à laisser occasionnellement la place à un certain groove grinçant. Ainsi, le doublé Pacify/Equality donne en quelque sorte le véritable coup d’envoi du concert, canalisant toute la rage primaire d’un band qui n’avait plus enregistré depuis un bail. On reste ébahi.e devant les prouesses du batteur Sami Latva maltraitant ses toms avec une brillante furiosité. Si Suburban Bliss reprend les codes d’un d-beat charnu (ce sous-genre du punk hardcore se rapprochant du crust et particulièrement chéri par le nord de l’Europe au début des années 80), Renewables, quant à lui, nous cloue littéralement au sol… C’est soixante secondes d’artillerie lourde, vicieuse et implacable. Un arsenal d’une rare intensité délivrée à un rythme fulgurant et avec une violence plus que palpable, bien que Rotten Sound
Rotten Sound


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soit suffisamment habile et intelligent pour varier son attaque, au point d’éviter une certaine monotonie. Ainsi, des morceaux comme Ownership ou Sharing présentent tous deux un groove boueux, piochant çà et là des éléments que l’on retrouve dans le death suédois (on pense immanquablement à Entombed
Entombed


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). À l’annonce de Slay, on assite à un premier mini moshpit composé de quatre spectateurs qui seront remerciés par notre ami Keijo en fin de show. C’est au bout d’une petite demi-heure durant laquelle les pacemakers des plus anciens d’entre nous ont été soumis à rude épreuve que le groupe quitte l’assemblée. Une prestation serrée, robuste et dont on ressort les tympans martyrisés… Mais cette déferlante écrasante à laquelle nous avons assisté en valait largement la peine.



La famille Brujeria
Brujeria


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n’aura pas été épargnée par les malheurs durant cette deuxième moitié d’année 2024. En effet, non content d’avoir perdu leur chanteur et responsable sampling Ciriaco ‘Pinche Peach’ Quezada en juillet, le groupe doit acter la disparition de leur membre fondateur John David ‘Juan Brujo’ Lepe quelques mois plus tard. Cette nouvelle tournée est donc l’occasion de rendre hommage à leurs chers disparus et c’est ainsi que Henry ‘El Sangrón’ Sanchez reprend le chant principal. La liste des cadors passés par la formation américaine est impressionnante. Pour rappel et pardonnez d’avance le name-dropping, Shane Embury (Napalm Death
Napalm Death


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), Dino Cazares (Fear Factory
Fear Factory


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, Divine Heresy
Divine Heresy


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), Billy Gould (Faith No More
Faith No More


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), Jello Biafra (Dead Kennedys
Dead Kennedys


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), Patrik Jensen (The Haunted
The Haunted


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), Tony Campos (Static-X
Static-X


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, Soulfly
Soulfly


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), Nick Barker (Cradle of Filth
Cradle of Filth


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, Dimmu Borgir
Dimmu Borgir


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), Adrian Erlandsson (At The Gates
At The Gates


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, Paradise Lost
Paradise Lost


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) et même un de nos hôtes du soir Jeff Walker (Carcass
Carcass


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) ont, entre autres, fait partie du gang californien. Excusez du peu ! Ne subsiste désormais qu’Anton ‘El Criminal’ Reisenegger (Pentagram (Chile)
Pentagram (Chile)


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, Lock Up
Lock Up


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) comme membre renommé et expérimenté. Brujeria
Brujeria


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doit son statut de groupe culte à son apparence et sa réputation révolutionnaire (bandanas couvrant la partie inférieure de leurs visages à la manière des bandidos mexicains, textes politiques assumés, accessoires issus d’une vieille tradition latino-américaine) et la coutume est évidemment une nouvelle fois respectée ce soir. Le décor est d’autant plus planté à la vue de ‘Coco Loco’, cette tête décapitée disposée sur un pied de micro et qui n’est autre qu’une reproduction de la pochette du tout premier album studio « Matando Güeros » sorti en 1993. D’emblée, la formation dégage une énergie contagieuse bien que le son ne soit pas tout à fait optimal, ce qui est en fait un peu le but du jeu. Avec El Desmadre, on nous embarque immédiatement dans une ambiance crade suintant rage et colère avant que le show ne prenne une tournure bien plus groovy avec un enchaînement parfait : Hechando chingasos - Vayan sin miedo – Angel de la frontera. Ce soir, il ne sera question d’aucun titre provenant pourtant du tout récemment paru « Esto Es Brujeria » (2023). Un show bien old school au délicieux accent chicano puisque notre camarade El Sangrón alternera plaisanteries tantôt en langue anglaise tantôt en langue espagnole pour le plus grand plaisir des spectateurs chiliens, colombiens, équatoriens et même… salvadoriens ayant fait le déplacement jusque Anvers. Une barrière de la langue qui n’empêche personne de reprendre en chœur les classiques que sont Chingo de mecos, Christo de la roca ou encore Consejos narcos un peu plus tard. La nature extrêmement concise de leur grindcore fait en sorte que les morceaux s’enchaînent à un rythme effréné et l’on passe un moment assez plaisant devant ces hymnes hispaniques directs et granuleux. Bien sûr, tout ceci est agrémenté de quelques pogos bien sentis mais quelque peu gentillets. Difficile de ne pas trouver ces ‘hombres locos’ totalement attachants surtout quand le chanteur se demande s’il n’y a pas un petit joint qui traine dans le public. C’est tout de suite moins le cas lorsqu’il dégaine et agite une énorme machette pour un Matando guëros des plus belliqueux. On prend congé de ces satanés ‘cabrones’ avec une version délirante de la Macarena délicatement et judicieusement renommée Marijuana. Cohérents et toujours aussi révoltés, nos rebelles masqués ont parfaitement assuré ! Bref, nous n’avons que trois mots à ajouter : Viva la Raza !



Il serait bien inutile de rappeler que Carcass
Carcass


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fait partie des groupes les plus influents que la scène death ait porté. Rarement pris en défaut pour ce qui concerne les lives, les Anglais ont toujours fait preuve d’une énorme classe et d’une authenticité sans nulle autre pareille. Devant un public parfaitement réchauffé et impatient d’en découdre, les deux compères de toujours que sont Bill Steer et Jeff Walker (dont on découvre le tout nouveau look : barbe et cheveux rasés) se présentent sur scène avec le reste de la troupe afin de balancer Buried Dreams après une intro toute en harmonie et en tension. De quoi nous envoyer un solo dantesque droit dans les dents sous des acclamations nourries. On accélère la cadence pour Kelly's Meat Emporium et ses blast beats éclairs permettant de constater que le recrutement de Daniel ''Dan'' Wilding (passé par Aborted
Aborted


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) en 2012 ne fut pas loin d’être l’idée du siècle ! Un bond dans le temps nous fait d’ailleurs revenir à la fin du millénaire précédent et Incarnated Solvent Abuse (1991) replonge les plus nostalgiques dans la frénésie d’une ère révolue qui revit profondément ce soir. Nettement représenté, l’album « Heartwork », considéré par beaucoup comme le chef-d’œuvre absolu des Liverpuldiens, est hautement mis en valeur avec un son résolument moderne, preuve d’une recherche constante à faire évoluer sa propre musicalité en l’adaptant à l’époque actuelle comme sur No Love Lost ou Death Certificate. Il a beau pleuvoir des slams, c’est qu’il commence à faire soif ! Et c’est durant l’intro du tribal Dance of Ixtab que Jeff Walker, grand seigneur, en profite pour distribuer quelques bouteilles d’eau à l’assemblée, ravitaillement fort bienvenu vu la moiteur ambiante qui commence à se faire sentir. Manque de pot pour la dernière qui atterrit sur le devant de la scène après avoir heurté le plafond, le bougre n’ayant pas jugé suffisamment la hauteur de ce dernier et qui se prendra la tête entre les mains, pleinement conscient de sa petite gaffe. Cette situation cocasse évitera tout juste de se répéter un peu plus tard avec le manche de sa basse dont la posture mythique mais exagérément surélevée manquera de faire des dégâts en cognant un projecteur situé juste au-dessus.



Bill Steer et son air fanfaron amusent la galerie et sa cool attitude est tout bonnement captivante surtout quand on voit avec quelle facilité déconcertante il enchaîne des solos aussi techniques les uns que les autres. Hommage direct ou indirect au barde Neil Young ensuite avec Keep On Rotting in a Free World après un Black Star étrangement glamour. Jeff Walker, petit par la taille mais grand par la voix en impose sévèrement, jouant de son instrument comme un prolongement de lui-même. James Nip Blackford est peut-être l’élément le plus en retrait, ce qui ne l’empêche pas d’abattre un travail remarquable comme sur le court mais non moins intense Genital Grinder rapidement suivi de Pyosisified (Rotten to the Gore), ultime témoignage du Carcass
Carcass


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ancestral. La puissance déployée sur scène ne fait que décupler mais la précision n’en est pas moins altérée. Comme une punition, Exhume to Consume, grand classique, nous est martelé avec une brutalité sans remords. Et que dire de 316L Grade Surgical Steel, prodigieusement retranscrit à l’aide d’un son fleurtant avec le sublime. On va même jusqu’à réveiller le spectre Iron Maiden
Iron Maiden


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sur This Mortal Coil et ses guitares en folie. On fond complètement devant Corporal Jigsore Quandary et ses riffs irrésistibles avant un Ruptured in Purulence des plus explicites et le dernier baroud d’honneur lancé par Heartwork, toujours aussi clinique et froid… En quittant son public, le groupe annonce une petite exclusivité en dévoilant leur présence au prochain Graspop Metal Meeting qui se tiendra du 19 au 22 juin 2025.

À la manière d’une centrale électrique tournant à plein régime, Carcass
Carcass


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aura alimenté son réseau ‘toute puissance dehors’ durant près de 75 minutes. Sans aucun signe d’essoufflement, ils ont une nouvelle fois démontré un niveau d’excellence qui commence à se faire rare pour des groupes d’un tel calibre et d’un tel âge ! 40 ans de carrière fêtés dignement et avec tous les honneurs pour le plus grand plaisir de leurs afficionados.

Comme un baume aussi efficace que miraculeux, Carcass
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répare mais ne sera jamais remplacé !



Remerciements à Eli Wouters (Biebob)

Textes et photos : Panda
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AUTEUR : Panda
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, pas...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...

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